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Baie de l'Enfer
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28 juin 2006

il cherche un poète dont le nom lui échappe

 

paves

 

 

Il jette un œil rapide à la vitrine, juste assez pour apprécier la mise en scène. Cela importe peu, il franchit la porte et s’enfonce droit vers la moitié de la première pièce, encore suffisament étourdi pour ne pas prêter attention non plus, à une dame cachée derrière l’écran d’un ordinateur. Il a besoin de toucher le papier, de tourner les pages, d’avaler à la hâte les quatrièmes de couverture des ouvrages dont le titre retient sa main. Migraine lancinante que le froissement des feuilles parvient à dompter. Etrange rapport du corps aux mots par la caresse des pages. Il se noie dans un rayon de poésie. Fébrile, il cherche, il ne sait plus qui, un poète sans doute, dont  le nom lui échappe mais qui murmure à ses oreilles une forte mélopée. Il entasse les livres en équilibre sur une seule pile. Pourquoi ceux-là sont-ils présentés à plat sur une table ? Il penche la tête par habitude sur l’épaule gauche comme pour survoler les titres d’un rayon.

« Vous désirez un renseignement ? »

Il sursaute pris au piège de la confrontation. Parler. Ouvrir la bouche. Proférer un son. N’importe quoi pour replonger dans sa solitude éberluée.

« J’erre, merci, je trouverais mon chemin. »

Ça lui a échappé, ces mots-ci comme d’autres, il n’y pensait pas. Il ne pense pas, il veut fouiller, se nourrir de l’effleurement des doigts sur les pensées écrites. Lire. S’abstraire. Un homme a écrit cela. S’abstraire du monde pour lui trouver un sens.

Lunettes sur le bout du nez, la dame se recache derrière l’écran d’ordinateur. Il devient transparent, il passe dans l’autre pièce. Pas de livres ici, des peintures, des sculptures. L’idée lui plaît. Un livre d’or. Il écrirait s’il pouvait admirer les oeuvres. Mais l’envie lui manque. La nausée remonte à ses lèvres. Le sol tangue. Il doit sortir, prendre un livre et quitter l’intérieur. Un livre de jardin, pourquoi pas ? Il le paie, sort en hâte et respire à nouveau.

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  • Né d’un soir de solitude et d’une canette de bière, réveillé amnésique sur un port avec la gueule de bois. Truc classique de celui qui joue un personnage, il met un peu de lui, un soupçon de rêves, une cuiller d’imagination et sa schizophrénie ordinaire.
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